Je devais avoir à peine dix ans. Je suis au dépanneur du rang où j’habitais derrière un homme qui est en train de payer à la caisse. En sortant l’argent de ses poches, un 10$ tombe par terre et il ne s’en rend pas compte, l’employé non plus. Je ramasse discrètement le magot et le glisse dans ma poche. Le cœur me débat. Le client sort du dépanneur, je paie mon chip et mon orangeade. Tout mon corps m’envoie des signaux de gravité. Je me décide enfin de courir dehors et de remettre l’argent à ce monsieur qui m’a félicité longuement de ce geste. Mes battements de cœur se sont vite rétablis.
Je me suis demandé quand même ce qui se serait produit si j’avais gardé le 10$. Peut-être ne s’en serait-il jamais rendu compte? Qu’aurais-je fait de ce trésor? Ma mère m’avait pourtant bien éduqué sur le bien et le mal. « Ne fais jamais aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse! » m’a-t-elle si souvent répété. C’est curieusement cette petite phrase qui me revient quand je suis tenté encore après toutes ces années de médire contre quelqu’un, d’arranger un peu la vérité pour que je prenne le crédit d’un succès qui ne m’appartient pas toujours.
Au début de ce Carême, Jésus fait face à trois tentations. Qu’est-ce qu’une tentation? Un bien apparent qui nous détourne d’un bien véritable. Le mal que l’on commet est toujours quelque chose qui nous fait du bien à première vue : on confond si aisément vengeance et justice, plaisir égoïste et vrai bonheur. Et nous le savons bien que pour rester libre devant les tentations, il nous faut des armes efficaces. L’Église nous en propose trois qui ont fait leurs preuves : l’aumône, le jeûne et la prière. C’est courageux de lutter contre le mal dans le monde, mais ne faut-il pas vaincre d’abord celui qui sommeille en chacun de nous? Bon carême! Bon combat! Lc 4, 1-13

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