Plus jeune, je me souviens que la porte de la maison était toujours ouverte. Des inconnus s’y arrêtaient, parfois pour prendre un café et quelques biscuits en jasant de tout et de rien. D’autres fois, les visites s’étiraient jusqu'à ce que mon père ose éteindre quelques lampes. Mais une visite dont je me souviens particulièrement, c’est lorsque le curé faisait sa visite paroissiale annuelle. Les jours avant, la tension montait d’un cran. Pas question de laisser quoi que ce soit à la traîne. Même mon père se faisait enguirlander. Quand le grand jour arrivait, maman savait quasi à la minute près quand il allait se présenter. Nous nous mettions à genoux et il nous donnait sa bénédiction en arrivant. Puis il passait au salon et, sans tarder, ma mère lui offrait une pointe de sa fameuse tarte au sucre qu’il ne refusait jamais, peu importe l’heure de sa visite.
Nous l’écoutions parler de tout et de rien. Il nous questionnait sur l’école et nous répondions en rougissant. Je me souviens assez peu de ce qu’il pouvait nous laisser comme message, mais sa bouille joyeuse me rassurait et au bout de quelques minutes, j’étais déjà moins anxieux. Quand je le revoyais les dimanches suivants, à l’église, j’ai toujours été renversé qu’il se souvienne de mon nom. J’écoutais son homélie sans tout comprendre, mais je savais qu’il était porteur d’un message qui le dépassait lui-même.
« Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous nous ferons une demeure. » dit Jésus. Que Dieu vienne chez moi, en moi, n’est-ce pas quelque chose de grandiose? Non seulement qu’il vienne faire une « petite visite paroissiale », mais qu’il vienne s’y faire une demeure, qu’il vienne chez moi pour y habiter, s’y installer, n’est-ce pas extraordinaire? En tout temps, pouvoir lui parler. En tout temps, le savoir proche de mes inquiétudes, de ce qui me préoccupe. La foi ne se réduit pas à croire que Dieu existe. C’est savoir que Dieu est là, présent, au plus profond de nous-mêmes, dans les moments heureux comme dans les plus difficiles. Si c'est bien le cas, c’est peut-être le temps de sortir la tarte au sucre du four…
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