Un soir comme un autre, voilà un peu plus de 2000 ans, des copains s'attablent pour un Seder pascal. Ils se rassemblent autour de Celui qui avait ardemment désiré manger cette Pâque avec eux. Les Juifs tiennent à ce mémorial de la sortie d'Égypte plus qu'à toutes les autres fêtes. Dans l'histoire de ce peuple, ce signe est au coeur de la transmission de la foi aux enfants.
Mais au cours de ce repas, il se passe quelque chose de particulier. Jésus transforme le sens des signes qui sont sur cette table. Des signes qui sont déjà extraordinairement chargés de l'histoire du salut de tout un peuple. Le pain, les azymes, autour duquel on évoquera la souffrance du peuple tenu en esclavage pendant tout ce temps. Des pains qui n'ont pas levé parce que les Juifs ont fui à la hâte. Du pain qui sera rompu, brisé, caché pendant que seront récités les alleluia. Et la coupe de bénédiction qui sera levée et remplie à ras-bord, signe de la Terre promise où le peuple a pu enfin entrer après avoir vaincu tant d'ennemis. Un coupe de joie et de débordement. Une coupe qui marque l'alliance incroyable entre Dieu et ce peuple élu parmi tous les peuples.
Et voilà que ces copains découvrent que ce pain est le signe d'une souffrance encore plus profonde, celle d'un corps livré pour tous. Ce pain est Jésus lui-même qui se donne tout entier pour nourrir toutes nos faims de justice, de vérité et d'amour. Les paroles de Jésus surprennent, mais elles réalisent plus pleinement pour chaque homme, pour chaque femme, le passage (Pessah) de l'esclavage à la vraie liberté, le passage de la mort à la vie, de l'égoïsme à l'amour. Cette coupe n'est plus seulement le signe de l'alliance ancienne inscrite dans la pierre des tables de Moïse, mais le vin d'une alliance nouvelle, celle d'un sang précieux de l'innocent versé pour le coupable, celle d'un sang qui rachète la vie du condamné à mort, celle d'un sang qui donne la vie qui ne finit pas.
Et après ce repas, ils partirent tous avec Lui à Gethsémani. Et là, ils furent séparés, dispersés, comme nous le sommes tous et toutes en ce moment. Ils n'arrivent plus à prier avec Lui dans cette nuit si froide. Ils s'endorment, comme il nous arrive parfois, après un repas et quelques coupes, pendant que se jouent leur vie et la nôtre. Demain, ils regarderont de loin et essayeront de comprendre ce qui se passe à travers cet événement. Ils se diront peut-être qu'il faisait bon d'être ensemble. Ils découvriront bientôt que c'était Lui qui les tenaient unis.
«Qui pourra nous séparer de l’amour du Christ? la détresse ? l’angoisse ? la persécution ? la faim ? le dénuement ? le danger ? le supplice ? J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les esprits ni les puissances, ni le présent ni l’avenir, ni les astres, ni les cieux, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est en Jésus Christ notre Seigneur. » Rm 8, 35.38-39
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